• CIMES Durables

Interview croisée : Pierre VOLLAIRE, maire des Orres, Président de la Commission Cimes Durables/Guillaume DESRUES, maire de Bourg-Saint-Maurice, Vice-Président de la Commission Cimes Durables

 

Quels sont selon vous les grands défis qui vont se présenter aux stations de montagne dans les prochaines années ?

Pierre Vollaire : les deux grands défis qui se posent d’ores et déjà et pour les années à venir sont d’une part la transition énergétique en lien avec la prise en compte du changement climatique, d’autre part la nécessaire évolution des modèles touristiques. Ces deux grands champs d’action mettent en jeu toutes les composantes des territoires de montagne : environnementales, économiques, sociales, technologiques, de gouvernance. Sur la transition écologique, il est important de coordonner et soutenir l’action des stations de montagne dans les domaines de la sobriété énergétique et la valorisation des ressources d’énergie renouvelable, le soutien à la mise en place de solutions efficaces de mobilité bas carbone, la gestion de la ressource en eau et des infrastructures, les actions dirigées vers l’habitat touristique, notamment. Sur le plan socio-économique, le défi majeur est de mettre en place de nouveaux modèles touristiques, notamment les activités toutes saisons et la promotion des sports et loisirs pleine nature en assurant leur contribution à un modèle économique pérenne. A cet égard, il est important de consolider les activités rentables existantes afin de financer le développement des modèles d’avenir. Sur le plan social, il faut réfléchir à une intégration équilibrée entre les apports touristiques et le maintien des populations locales par l’attractivité intergénérationnelle des communes, notamment par le développement des technologies numériques, des services aux populations (écoles, santé, services publics, lieux de vie) et la recherche de modèles pérennes pour les activités traditionnelles (promotion de la production agricole et développement des circuits courts ainsi que des activités artisanales).

Guillaume Desrues : plusieurs enjeux majeurs s’annoncent pour nos stations, en lien avec les problématiques actuelles de la montagne : changement climatique, désintérêt d’une partie de notre population pour le ski… La diversification de nos activités est indispensable, notamment grâce au tourisme 4 saisons qui doit absolument s’appuyer sur notre savoir-faire hivernal reconnu dans le monde entier. Je suis persuadé que de nouveaux modes de vie vont s’inscrire avec le plaisir d’être en montagne : les travailleurs nomades, la recherche d’une autre qualité de vie pour les familles, et pourquoi pas l’installation d’une nouvelle économie liée à notre potentiel de production d’énergies renouvelables (hydraulique et solaire notamment). Le chantier d’une montagne « 0 Carbone » s’ouvre à nous. Nous devons être exemplaires notamment en terme de mobilités (qui est la source de la majorité de nos émissions en GES pour les stations). Cela tombe bien : un des moyens de transport le moins polluant est le transport par câble.

 

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Comment les pouvoirs publics doivent-ils accompagner les stations de montagne dans le cadre des évolutions en cours ?

 

PV : il apparaît essentiel de favoriser l’accompagnement des stations dans leurs démarches, tant du point de vue du support à l’investissement dans des projets structurants que dans les démarches administratives et l’ingénierie projet, ainsi que dans le support à l’action à tous les niveaux territoriaux : la commune en premier lieu, garante de l’équilibre et de l’adéquation à ses conditions spécifiques de sa vision de développement territorial, l’intercommunalité ensuite, en charge de la gestion des infrastructures à une échelle valléenne, la Région, la politique de massif et enfin les macro-régions européennes, en favorisant les remontées bottom-up. Compte tenu des conditions actuelles très difficiles que connaissent les stations et territoires de montagne, il est impératif de simplifier et d’accélérer les démarches administratives et de mettre en place des mesures fiscales incitatives et des aides directes.

GD : leur rôle est primordial. Au même titre qu’il y a eu le plan « Neige », le plan « Montagne » doit garantir aux communes de montagne les moyens de leur transition et de leur adaptation, surtout en cette période difficile où nombre de stations ont vu fondre leurs recettes fiscales. D’autre part, l’une des clés de réussite sera immanquablement notre capacité à stabiliser nos populations à l’année. Il n’est pas pensable que des communes aussi dynamiques économiquement n’arrivent pas à loger sur place leurs travailleurs et que leur population baisse. Les pouvoirs publics doivent nous accompagner à trouver des solutions de logement abordable pour nos habitants !

Quel rôle peut avoir la commission Cimes Durables de l’ANMSM dans cette nouvelle dynamique ?

PV : fédérer pour porter la voix des élus des communes/ stations de montagne auprès des pouvoirs publics et de l’Europe pour conduire dynamiquement la transition écologique et touristique. En collectant les retours d’expérience et les bonnes pratiques développées sur leurs territoires, les maires des stations de montagne sont les garants de la reproductibilité et de la performance des nouveaux modèles à mettre en place pour assurer les objectifs de la montagne durable et performante de demain. L’ANMSM, par son rôle fédérateur, est un acteur de premier plan pour les décisionnaires des politiques d’aménagement au niveau national et européen.

GD : notre commission doit pouvoir montrer que la transition est possible. Nous avons déjà plein de bonnes pratiques qui sont arrivées dans nos stations. Un des rôles de notre commission est donc de « faire le lien » et promouvoir les actions vertueuses menées par les uns et les autres. Ensemble, on est plus forts !